À Propos

Plantes et théâtre

Les Conservatoire et Jardin botaniques (CJB) rendent visite cette saison au Théâtre de l’Orangerie, et proposent de mettre en lumière le lien historique qui anime ce lieu depuis sa création : l’art théâtral et les plantes. 

En 1854 ou 1855, mon père transporta le jardin potager au nord-est de la cour et des dépendances, y fit construire deux serres et une grande orangerie doublée d’un petit théâtre. William Favre

Inaugurée le 11 mars 1856, l’orangerie-théâtre est utilisée pour des représentations jusqu’à la fin du 19èmesiècle. C’est en 1918 que la propriété Favre entre en possession de la Ville de Genève pour devenir un parc public. Si la fonction d’orangerie est toujours restée en service, sa vocation théâtrale n’a repris une activité que dans les années 1980. Une importante restauration de l’ensemble du site est réalisée par la Ville de Genève entre 2008 et 2010, pour donner forme au théâtre que l’on connaît aujourd’hui.

Le terme d’orangerie désigne un bâtiment, en partie vitré, qui abrite des arbres exotiques pendant l’hiver, les protégeant ainsi du gel. À l’origine, ce sont essentiellement des collections d’agrumes qui sont importées d’Asie en Europe, répondant plus à un désir d’exotisme qu’à une logique de production fruitière. À la suite de l’oranger, plusieurs plantes emblématiques de régions chaudes et lointaines, comme le grenadier ou l’olivier, viennent diversifier ces luxueuses collections. Aujourd’hui encore, les jardiniers ont un fort attrait pour l’acclimatation d’espèces exotiques sous nos latitudes.

La collection de bacs d’orangerie des Conservatoire et Jardin botaniques de Genève est constituée d’une belle diversité de plantes. Plusieurs sujets passeront donc exceptionnellement leur été au Théâtre de l’Orangerie. Laissez-vous surprendre par l’élégant feuillage bleuté de Butia capitata, le savonnier (Sapindus saponaria) utilisé comme lessive naturelle, l’étonnante morphologie des feuilles de l’Acacia melanoxylon, ou encore le faux goyavier (Acca selowiana).

Toutes ces plantes sont cultivées en bacs, de manière à être transportées à l’extérieur pendant la belle saison. À partir d’une certaine taille, ces bacs sont fabriqués sur mesure. Les bacs ronds sont inspirés du savoir-faire des tonneliers et nécessitent des rempotages réguliers. La conception des bacs carrés, de style versaillais, permet de retirer chacun des quatre côtés de manière à tailler régulièrement le système racinaire des plus gros sujets. Cette technique s’apparente d’une certaine manière aux bonzaïs, permettant ainsi de conserver des arbres en pots pendant plusieurs décennies, à l’image de sujets centenaires, comme les Podocarpus neriifolius ou les Chamaerops humilis, à découvrir lors d’une prochaine visite au Jardin botanique !

La fascination et l’habilité des botanistes européens à importer, protéger et reproduire les plantes des pays chauds a accompagné l’histoire, plus trouble, de la colonisation de ces mêmes pays. 

Nous préférons toutefois ici saluer l’idée même d'orangerie comme lieu qui abrite et protège les plantes pendant les hivers trop rudes de nos latitudes. Sans cette orangerie par exemple, nous n’aurions pas de théâtre qui accueille, à la belle saison, d’autres êtres vivants et leurs histoires, tout aussi mystérieuses. 

Nous imaginons que l’hiver venu, les plantes se rejouent pour leur plaisir les pièces qu’elles ont entendues durant l’été. Qui sait, peut-être y a-t-il une saison du TO dont nous n’avons pas connaissance, jouées par d’autres espèces…

La coïncidence veut qu’à Genève le Jardin Botanique soit géré par le Département de la culture. Végétation et arts, une combinaison magique que le TO aime cultiver ! La collaboration était dans l’air, elle est aujourd’hui sur terre.

L’équipe du TO